Comme je l'ai déjà dit, je n'a pas voulu voir la gravité de son état jusqu'à la dernière semaine de sa vie quand un collègue de travail me l'a dit.
Lui cependant le savait. Il me le disait parfois par petites touches sans insister, mais je le rabrouais gentiment, pensant que c'était son pessimisme habituel qui le faisait parler comme ça.
Maintenant, d'un côté je regrette d'avoir ignoré ses avertissements. Il est resté seul face à la mort, sans soutien de ma part. Nous n'en avons pas parlé, il ne m'a pas dit ses angoisses.
D'un autre, même si j'en avais été consciente, en aurions nous parlé? Le connaissant, lui si pudique face aux sentiments, il est probable que non. Il ne m'aurait rien dit. Et je n'aurai peut-être pas pu jouer mon rôle de locomotive de la famille, si j'avais été submergée par la conscience qu'il allait disparaitre.
Je ne saurais jamais cependant comment il vivait ça. Peur, angoisse ou au contraire sérénité, voire attente.
Il ne me paraissait pas spécialement angoissé. Lorsqu'il en parlait c'était toujours légèrement, avec un sourire. Pour me le dire quand même, tout en évitant que je le prenne au sérieux? Je ne sais pas, je ne le saurais jamais, là non plus.
Depuis qu'il était dépressif, trois ans avant d'être malade physiquement, il me disait souvent qu'il n'avait plus envie de vivre. Alors, la mort n'était peut-être pas angoissante pour lui. Au contraire, c'était peut-être une délivrance.